Bio/Bibliographie : Fergus Hume
Avec Fergus Hume, c’est un véritable géant du roman policier — ou, pour être plus précis, du roman mystérieux — qui a fait son entrée dans la collection « Baskerville ». Auteur du premier véritable best-seller du genre, annonciateur du roman d’énigme anglais, il a publié près de cent cinquante ouvrages en un peu moins de cinquante ans de carrière, se montrant plus particulièrement prolifique avant la Première Guerre mondiale et se voyant traduit dans le monde entier, notamment en France.
Toute sa vie durant, il n’aura de cesse d’expérimenter de nouvelles formes, de nouveaux genres, mais c’est au policier que l’identifiera son public, et il saura à merveille combler ses attentes.
Né le 8 juillet 1859 à Powick, dans le Worcestershire, Ferguson Wright Hume n’a que trois ans lorsque son père, le Dr James Hume, quitte l’Angleterre pour émigrer à Dunedin, en Nouvelle-Zélande. C’est aux antipodes que le jeune Fergus sera élevé, plus précisément à Otago, où il fera des études de droit et recevra son diplôme en 1885. Peu après, il va s’établir à Melbourne, en Australie, où il travaille dans un cabinet d’avocat tout en essayant de percer comme auteur dramatique.
C’est un échec : personne ne s’intéresse à ses pièces de théâtre. Il décide alors de publier un roman pour se faire connaître, et ce sera Le Mystère d’un hansom cab (The Mystery of a Hansom Cab, 1886), qui le rendra mondialement célèbre. Ainsi qu’il l’expliquera dans la préface de la réédition de 1898, il s’est renseigné sur les romans les plus populaires du moment et, découvrant que les œuvres d’Émile Gaboriau connaissaient un vif succès, en a lu une dizaine et s’en est inspiré pour construire son intrigue.
Après avoir essuyé le refus des éditeurs du cru, il décide de publier le livre à ses frais. Le premier tirage de cinq mille exemplaires s’épuise en un rien de temps, ainsi que les trois suivants, pour un total de trente-cinq mille exemplaires. Un entrepreneur londonien a vent de la chose et lui achète le copyright de son œuvre pour en réaliser une édition anglaise. Bilan : trois cent quarante mille exemplaires vendus en deux ans (1).
Encouragé par ce succès, Fergus Hume regagne son Angleterre natale, bien décidé à faire de l’écriture son métier. Sur le plan financier, il ne retire guère de bénéfices de son premier roman, dont il a cédé tous les droits, mais les portes des éditeurs lui sont désormais grandes ouvertes et les livres se succèdent à un rythme effréné.
Les quelques interviews de l’époque nous montrent cependant un auteur quelque peu aigri et frustré d’être confiné à un seul genre. L’ambition de devenir dramaturge ne l’a pas quitté, mais, dans ce domaine, le succès continue de lui échapper. Côté roman, s’il fait quelques échappées vers le féerique ou le sentimental, c’est sans convaincre son public qui réclame du meurtre et du sensationnel.
Alors Fergus Hume va le satisfaire.
Est-ce à cause du succès de Sherlock Holmes, qui a fait ses débuts un an après Le Mystère du hansom cab ? Notre auteur crée lui aussi deux personnages de détectives, Dowker, héros du roman The Piccadilly Puzzle (1889) et d’un ouvrage tout simplement intitulé Dowker, Detective (1892), et le très ambigu Octavius Fanks, « le Vidocq anglais », mais il semble se lasser de celui-ci au bout de quatre romans (Monsieur Judas, 1891, The Chinese Jar, 1893, The Carbuncle Clue et Tracked by a Tattoo, tous deux en 1896) ; quelques années plus tard, on le verra créer une attachante « Rivale de Sherlock Holmes », Hagar la Gitane, un personnage très atypique (Hagar of the Pawn-Shop, 1898).
Mais, très vite, il semble abandonner l’idée d’animer un personnage récurrent, pour laisser vagabonder son imagination au fil d’intrigues de plus en plus tortueuses, émaillées de coups de théâtre de plus en plus stupéfiants…
Comme dit plus haut, il ne retrouvera jamais le succès de son premier roman et, à en croire Mike Ashley (2), il vécut dans la pauvreté et, lorsqu’il décéda le 13 juillet 1932, à Thundersley, dans l’Essex, peu après avoir achevé son ultime roman, il était quasiment tombé dans l’oubli.
Une partie de son œuvre fut traduite en français, mais, avant la parution du Secret d’un crime, les seuls de ses romans qui soient disponibles étaient le célébrissime Mystère d’un hansom cab et L’Ombre mystérieuse, tous deux réédités chez Terre de Brume, le premier ayant été repris en poche par Rivages. Les romans jadis parus dans les collections « Le Masque » et « La Clé », ainsi qu’aux éditions Tallandier, sont à chercher chez les bouquinistes… en attendant, qui sait ? d’être réédités dans cette collection.
Jean-Daniel Brèque
- Chiffres donnés par Robert Dixon dans l’introduction à The Mystery of a Hansom Cab, Sydney University Press, 2010.
- Who’s Who in Horror & Fantasy Fiction, Elm Tree Books, Londres, 1977.
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